JURIDIQUE

Nouvelles dispositions légales

L’arsenal juridique destiné à permettre la réalisation d’infrastructures urbaines de transport souterrain s’enrichit d’une nouvelle servitude d’utilité publique.

La construction d’une ligne de métro ne nécessite plus l’acquisition systématique des volumes nécessaires en sous-sol. La loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique, dont l’une des ambitions est de favoriser le développement des transports « propres » en milieu urbain, instaure une servitude d’occupation de l’espace souterrain au bénéfice des maîtres d’ouvrage de ces d’infrastructures (C. transports, art. L. 2113-1 à L. 2113-5, créés par L. n°2015-992, 17 août 2015, art. 52, V). Elle habilite, en outre, le Gouvernement à définir par ordonnance une servitude de passage à destination, cette fois-ci, des transports urbains par câbles (L. n°2015-992, 17 août 2015, art. 52, IV). La création de ces nouveaux outils juridiques doit permettre aux opérateurs d’éviter, lorsque c’est possible, le recours à l’expropriation dont la procédure se révèle particulièrement contraignante dans les zones densément peuplées.

Un privilège d’occupation du sous-sol pour les transports ferroviaires ou guidés

La loi ouvre au maître d’ouvrage d’une infrastructure souterraine de transport public ferroviaire ou guidé (ou à toute personne agissant pour son compte) la possibilité de demander à l’autorité administrative d’établir une « servitude en tréfonds », selon la formule consacrée. Cette servitude confère à son bénéficiaire le droit d’occuper le volume souterrain nécessaire à l’établissement, l’aménagement, l’exploitation et l’entretien de l’infrastructure. Elle oblige également les propriétaires des immeubles et les titulaires de droits réels concernés à s’abstenir de tout fait de nature à nuire au bon fonctionnement, à l’entretien et à la conservation des ouvrages. En contrepartie, ces derniers ont droit à une indemnité compensatrice lorsque le préjudice qui en résulte présente un caractère direct et certain. L’indemnité est fixée par accord amiable ou, à défaut, dans les conditions prévues par le code de l’expropriation (C. expr., art. L. 311-1 à L. 331-6).

Une alternative à l’expropriation

Le régime de cette servitude a vocation à pallier les inconvénients de la procédure d’expropriation en permettant une réalisation rapide des travaux. En premier lieu, l’établissement d’une servitude en tréfonds, dès lors qu’il n’aboutit pas à déposséder le propriétaire de son bien, ne nécessite pas des formalités aussi lourdes. S’il doit être précédé d’une procédure contradictoire (dont le détail reste à préciser par décret), celle-ci se limite à l’information des personnes susceptibles d’être affectées quant aux motifs justifiant la mise en place d’une servitude, ainsi qu’au recueil de leurs observations dans un délai maximal de 4 mois.

En second lieu, à la différence des règles applicables en matière d’expropriation, la loi ne conditionne pas l’application de la servitude en tréfonds au versement préalable d’une indemnité. Dès lors, selon le rapporteur du projet de loi, les travaux peuvent être engagés dès que la demande d’établissement a été régulièrement acceptée.

Remarque : la possibilité d’une réalisation des travaux préalable à l’indemnisation n’est pas spécifique au régime de la servitude en tréfonds. En vue de la réalisation des infrastructures du réseau de transport du Grand Paris, la Société du Grand Paris bénéficie d’une procédure d’expropriation d’extrême urgence autorisant une prise de possession anticipée sans intervention préalable du juge de l’expropriation ni versement de l’indemnité (L. n°2010-597, 3 juin 2010, art. 5). Toutefois, cette procédure d’exception n’a pas été jugée suffisamment adaptée aux besoins. Au cours des débats parlementaires, l’incapacité des magistrats a répondre à la totalité des demandes d’expropriation d’urgence dans les délais prévus pour l’exécution des travaux a notamment été soulignée. Cette inadéquation a motivé la création d’un régime de servitude bénéficiant, en outre, d’un champ d’application étendu à l’ensemble du territoire national.

La DUP incontournable du projet d’infrastructure

Le maître de l’ouvrage ne peut bénéficier d’une servitude en tréfonds que si le projet d’infrastructure a été préalablement déclaré d’utilité publique. En effet, la servitude ne peut s’appliquer qu’après publication de l’acte déclaratif, même si les obligations d’information et de recueil des observations des propriétaires concernés ont été accomplies en amont.

Une profondeur minimale de 15 mètres

La servitude d’utilité publique en tréfonds ne peut être établie à moins de 15 mètres au-dessous du point le plus bas du terrain naturel, sous réserve du caractère supportable de la gêne occasionnée.

Son impact sur les droits des propriétaires doit donc demeurer raisonnable.

A défaut, elle constitue une privation du droit de propriété conformément au principe défini par le Conseil constitutionnel (C. constit., déc. 13 déc. 1985, n°85-198 DC).

L’étude d’impact annexée au projet de loi souligne que la profondeur minimale prévue par la loi garantit l’absence de conséquences pour les constructions en surface ou la constructibilité des terrains. Dès lors, le propriétaire devrait, a priori, pouvoir conserver une utilisation normale de son bien. Si tel n’est pas le cas, il pourra bénéficier d’un droit de délaissement au profit du maître de l’ouvrage de l’infrastructure de transport, à condition d’en faire la demande dans un délai de 10 ans à compter de l’établissement de la servitude……

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